La formation e-commerce d’Alibaba a permis à une jeune entrepreneure rwandaise de lancer une marque de mode haut de gamme protégeant l’environnement.

Zoom sur un succès de la relation Chine Afrique : Kevine Kagirimpundu, 29 ans, est la fondatrice de la marque rwandaise de mode Uzuri k & y, qui compte une équipe de près de 100 personnes. Son innovation : recycler des pneus usés pour fabriquer des chaussures à la mode et favoriser le développement durable. Kevine fait partie du top 10 du Concours des entrepreneurs africains organisé par la Fondation Jack Ma. Elle a frappé le gong lors de la cérémonie de l’entrée en bourse d’Alibaba à Hong Kong. Elle a été accueillie par le président rwandais pour parler des perspectives du développement économique africain. Dans un entretien avec le Quotidien du peuple en ligne, Kevine a reconnu qu’étudier l’e-commerce avait changé son destin.

Il y a huit ans, Kevine, encore étudiante, a pris la décision d’abandonner sa formation d’ingénieur civil, très propice à l’obtention d’un travail, et de tenter la voie plus hasardeuse de la création de mode. Elle a remarqué qu’un grand nombre de pneus usés dans sa ville étaient jetés dans les décharges où il leur fallait des années pour se dégrader. En outre, ces décharges sont des lieux de reproduction de moustiques, propagateurs de toutes sortes de maladies.

Une idée lui est alors venue : pourquoi ne pas fabriquer des chaussures à la mode avec ces pneus usés ? Cela permettrait non seulement de protéger l’environnement, mais aussi de contribuer à des créations artistiques. Kevine en est fière : « Nous pouvons à la fois fabriquer des produits à la mode et être apprécié des jeunes par une action pour l’environnement ».

Kevine a immédiatement mis en œuvre ses idées. A l’époque, elle ne connaissait rien à la fabrication de chaussures ! Elle a donc cherché des informations très pratiques sur internet. Puis elle a découvert sur le site international du groupe chinois Alibaba des fournisseurs qui pouvaient répondre à ses besoins en matières premières et en équipements. Elle a alors établi à partir de 2015 une coopération avec eux et maintenu les contacts avec l’application Dingding.

Elle a créé sa marque, Uzuri k&y (voir son site), et constitué son équipe qui compte actuellement 85 personnes, dont 70 % sont des femmes. En 2019, son chiffre d’affaires a franchi la barre des 100 000 dollar et des dizaines de milliers de pneus usés ont été recyclés. Une boutique hors taxes a été créée à l’aéroport de Kigali, la capitale rwandaise. Dans le même temps, Uzuri k & y est entré sur la plate-forme de commerce électronique en Afrique eWTP, créée par le gouvernement rwandais en coopération avec Alibaba.

Et ce n’est que le début. Kevine envisage de promouvoir un modèle de franchise, avec le projet de vendre ses produits dans dix pays africains d’ici cinq ans. Basée au cœur de l’Afrique, l’équipe s’internationalise progressivement. Kevine parle sans complexe de ses ambitions : « Pour se faire remarquer sur le marché international, nous devons d’abord entrer en Chine, en Europe puis dans d’autres pays et régions. Nous voulons être à l’avant-garde de la mode ».

 Former les habitants locaux pour les sortir de la pauvreté

« Ce que nous vendons, ce n’est pas seulement des produits. Nous promouvons également un concept de développement durable, respectueux de l’environnement. Nous voulons changer la mentalité des consommateurs pour leur faire comprendre qu’en achetant un produit, ils aident aussi à changer le destin de gens quelque part dans le monde », explique-t-elle.

En effet, en dehors de son succès commercial, Uzuri k&y organise chaque année un programme de six mois pour former les cordonniers rwandais locaux. La demande est forte. « Notre programme de formation de 50 places a reçu 300 demandes, et d’innombrables personnes désirent acquérir des compétences, explique Kevine. Nous avons avancé par petits pas, en commençant par une formation en cordonnerie. Puis nous avons créé un centre de formation pour enseigner plus généralement l’artisanat de qualité. Dans le même temps, nous enseignons les bases de l’entrepreneuriat, particulièrement aux jeunes et aux femmes. Nous formons également des formateurs en cordonnerie. Après leur formation, ils retournent dans leur ville natale, où ils peuvent continuer à enseigner le métier à d’autres ». C’est un cercle vertueux : des jeunes diplômés créent leur propre entreprise, ils aident localement des gens à acquérir des compétences, lesquels peuvent gagner leur vie et sortir de la pauvreté.

À l’heure actuelle, le centre a formé 1 060 personnes, dont 10 ont créé leur propre entreprise avec succès. Kevine envisage de former 10 000 personnes en cinq ans.

Il est plus difficile pour les femmes de créer une entreprise

Pour Kevine, l’entrepreneuriat n’a pas été toujours facile. Elle n’avait que 20 ans quand elle a créé son entreprise. Incapable de fournir des garanties, les banques lui refusaient les crédits. « Mais je n’étais pas découragée, les femmes doivent peut-être travailler deux fois plus que les hommes pour réussir et pour que les gens ne les sous-estiment pas. Si mes paroles sont ignorées à cause de ma jeunesse, alors je parlerai plus fort. Je fais tout pour faire entendre ma voix et faire reconnaître mon point de vue », dit-elle.

Kevine a travaillé dur et a appris les questions financières elle-même, en défendant sans cesse face aux investisseurs son plan d’entrepreneuriat. Aujourd’hui, avec le succès de son entreprise, elle continue à aider les femmes. « Ma voix et mes actions représentent toutes les femmes et je parle en leur nom. Je pense que les hommes et les femmes doivent travailler ensemble », dit Kevine, citant Jack Ma, le fondateur d’Alibaba : « les hommes font bouger les choses, les femmes améliorent les choses, les hommes et les femmes doivent travailler ensemble ». Pour Kevine, les femmes doivent avoir confiance en elles et saisir les opportunités qu’offrent les progrès technologiques.

La pandémie du Covid-19 a affecté les ventes et pendant une période, il n’y a presque pas eu de bénéfices. Mais Kevine n’a pas réduit les salaires ni licencié son personnel. « Si j’avais licencié mes employés, leurs enfants auraient été privés de nourriture et toute la famille contrainte à une vie très difficile », a-t-elle expliqué. Elle a choisi de profiter du confinement pour renforcer la formation professionnelle et continuer à développer leur plate-forme en ligne : « nous avons beaucoup appris et toute l’équipe est devenue plus forte et plus solidaire ».

Apprendre avec Alibaba a « changé sa vie »

Le 31 octobre 2018, le gouvernement rwandais a établi une coopération avec Alibaba dans la capitale Kigali pour construire ensemble le premier centre d’eWTP en Afrique (plate-forme de commerce électronique).

En mars 2019, Kevine s’est rendue à Hangzhou pour participer à la formation des jeunes entrepreneurs mise en place par Alibaba. Jack Ma est l’entrepreneur qu’elle admire le plus et qui est pour elle « une grande source d’inspiration ». « J’ai découvert cette opportunité de formation un peu par hasard, dit-elle. Nous envisagions de lancer un magasin en ligne et j’ai pensé que la formation serait l’occasion d’accéder à la plate-forme de commerce électronique la plus développée au monde ».

Ses deux semaines de formation ont été une excellente expérience pour Kevine. Elle a progressé en management et pu constater à quel point le commerce électronique peut bouleverser le modèle commercial traditionnel en réduisant considérablement les coûts opérationnels.

Elle a notamment effectué une visite dans le village Taobao pendant sa formation. « Dans ce village intelligent, c’était incroyable de voir comment Alibaba répond aux besoins de la communauté à travers la science et les technologies. La technologie permet aux villageois d’être interconnectés et de faire des transactions avec les habitants d’autres villes sans quitter leur domicile. Ainsi, leur vie devient beaucoup plus facile », dit-elle.

« La formation à Hangzhou a élargi mes horizons, et je veux apporter ce modèle dans ma ville natale pour créer plus de possibilités pour les habitants de gagner leur vie », ajoute-t-elle.

Après sa formation, Kevine est retournée au Rwanda et elle a ouvert sa première boutique en ligne un mois plus tard, devenant rapidement la marque de mode numéro 1 en ligne du Rwanda. En seulement six mois, la boutique a été rentable et a même reçu des commandes de clients européens.

En novembre 2019, Kevine a participé au Concours des entrepreneurs africains organisé par la Fondation Jack Ma. Elle s’est classée parmi les dix premières. Elle a raconté son histoire d’entrepreneuriat devant son « idole » Jack Ma, et obtenu un fonds de démarrage. Fin novembre, elle a été invitée à Hong Kong, pour sonner le gong de l’entrée en bourse d’Alibaba à Hong Kong.

En septembre 2019, dans le cadre de la coopération eWTP, l’Alibaba Business School de l’école normale de Hangzhou a lancé sa première classe de premier cycle pour les étudiants rwandais (voir notre article précédent). Cette année, Kevine a parlé avec ces étudiants à Hangzhou par vidéo-conférence et elle les a encouragés à travailler dur dans cette « école d’excellence ». Son message a été direct : le développement économique du Rwanda a besoin de plus de talents ayant reçu une éducation de haut niveau, elle est prête à leur offrir des opportunités de stages et d’emploi, elle espère qu’ils pourront faire mieux qu’elle !

Avec People’s Daily

 

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