Lentement mais sûrement, les marques automobiles chinoises se font de la place au soleil dans ce pays de l’extrémité ouest du continent africain
Great Wall, King Long, Dong Feng, Lifan, Chery, Howo, etc. Ils sont de plus en plus nombreux les véhicules chinois qui roulent sur les routes sénégalaises. Ils se disputent, de plus en plus, les parts de marché avec les véhicules français, allemands, japonais, sud-coréens et américains, entre autres.
En effet, c’est au milieu des années 2000 que les véhicules de marques chinoises ont fait leur apparition sur le marché sénégalais. Dakar venait de renouer ses relations diplomatiques avec Beijing. Des hommes d’affaires sénégalais avertis, sentant les atouts économiques de la Chine, n’ont pas manqué d’explorer le marché prometteur de ce grand pays asiatique. Parmi eux, il y a le magna Serigne Mboup du Holding CCBM dont une des entités, CCBM Automobiles, sera le représentant exclusif de la mythique marque chinoise Great Wall, mais aussi des véhicules de marque Chery. Ainsi donc, en partenariat avec l’État du Sénégal, il a déroulé le programme « Sister Taxi », visant à doter les jeunes dames qui le souhaitent de taxi de marque Chery. Avec la marque Great Wall, il a participé à démocratiser les pickups au Sénégal.
À l’époque, plusieurs structures publiques, parapubliques et privées se sont dotées de ces véhicules. Et, le summum pour cet homme d’affaires, c’est lorsqu’il a remporté le marché lancé par l’État du Sénégal, d’un montant de 2,25 milliards de francs CFA, visant à doter les 150 députés de la onzième législature de véhicules. C’est naturellement vers la Chine qu’il s’est tourné pour acquérir des 4×4 Hover.
Au début des années 2010, le gouvernement du Sénégal a lancé un programme de renouvellement du parc automobile visant à améliorer la mobilité des populations dans des conditions de confort et de sécurité. Trois ans auparavant, il a mis en place le Conseil exécutif des transports urbains de Dakar (CETUD), un établissement public à caractère professionnel créé par la loi N° 97-01 du 10 mars 1997 dont la mission consiste à la mise en œuvre et au suivi de l’application de la politique sectorielle des transports publics urbains définie par l’État, pour la région de Dakar. Un programme qui sera, par la suite, étendu aux autres régions.
C’est d’ailleurs dans le cadre de ce programme que l’État, plus tard, a mis en place l’Association de financement des professionnels du transport urbain (AFTU) en vue de contribuer au renouvellement du parc d’autocars, d’autobus, de favoriser la professionnalisation de l’activité dans les domaines de l’exploitation et d’améliorer la qualité du service offert à la clientèle. Avec 0,3 % du territoire national, Dakar concentre le quart de la population sénégalaise et 72 % du parc automobile. La majeure partie des déplacements de ces populations se faisait avec des minibus qui ont une moyenne d’âge de 28 ans, d’où la pertinence du programme de renouvellement du parc automobile.
Coup de pouce bancaire
C’est ainsi que grâce à un financement d’un montant de 11,2 milliards de francs CFA de la China Exim Bank, AFTU a pu acquérir 402 minibus King Long livrés à partir du 5 octobre 2010. Ceci est la phase 2 du programme de renouvellement du parc automobile. La phase 4 portait sur 250 bus Dong Feng et d’une autre marque.
À côté de la société privée AFTU, la société publique de transport en commun Dakar Dem Dikk a acquis 235 autobus chinois grâce à une enveloppe de 15 milliards de francs CFA de la China Exim Bank. Dans le cadre de la modernisation du secteur des transports terrestres, le chef de l’État sénégalais a réceptionné en janvier 2019 un important lot de matériel roulant. Ce dernier, composé entre autres de véhicules de marque chinoise, est constitué de 800 minibus pour les opérateurs privés du transport à Dakar, 542 bus pour le transport interurbain de voyageurs, 72 camions gros porteurs, 50 taxis pour l’aéroport international Blaise Diagne (AIDN). C’était en marge de l’inauguration de la gare des gros porteurs de Diamniadio.
Ce renouvellement du parc roulant de Dakar concerne également les motocycles et les tricycles. Les motocycles de marques chinoises ont fait leur entrée dans le marché sénégalais ces dix voire quinze dernières années. Les motos de marque Lifan sont beaucoup plus usitées dans les régions qu’à Dakar. Elles font partie prenante du paysage des transports terrestres sénégalais, surtout en province.
Il y a aussi les tricycles de la même marque. Ces véhicules utilitaires, très pratiques du reste, sont transformés en fonction des usages qu’on en fait. Ainsi donc, depuis janvier 2018, c’est pas moins de 600 tricycles qui sont déployés dans 12 régions du pays à raison de 50 par région. Parfait pour le transport en zone rurale ou dans des conditions précaires, le tricycle s’adapte à tous les types de relief au Sénégal. C’est sans doute cette adaptabilité qui pousse Daaba Services, une PME sénégalaise, à se spécialiser exclusivement dans la vente de tricycles de marque Lifan. Selon une de ses responsables, Aissatou Djigo Sy, depuis huit ans, sa société, qui vendait à l’origine des pièces détachées de véhicules, est le représentant exclusif de la marque au Sénégal. Mme Sy trouve que les prix, qui varient de 1,2 million de francs CFA à 1,65 million de francs CFA en fonction des modifications apportées, sont très compétitifs.
L’équation des pièces
Dans le segment des gros porteurs et autres engins lourds, les véhicules de marques chinoises sont aussi présents au Sénégal, avec la commercialisation d’une gamme de camions poids lourds. En effet, la société China Railway Seventh Group (CRSG), présente à Dakar depuis 2014, commercialise les gammes de produits automobiles Sinotruk. Avec ses différentes marques, Sinotruk qui est, entre autres, propriété de Howo, Sitrak, Hohan, Str, dispose de camions-bennes, véhicules poids lourds, grues, camions militaires, etc.
Pour répondre à la problématique des pièces de rechange que rencontrent souvent les véhicules de marque chinoise au Sénégal, Sinotruk a installé à Diamniadio un important centre. D’après Wang Chuanbo, le directeur du Bureau Sinotruk International Sénégal, la société vend annuellement au Sénégal 400 véhicules et 2 000 en Afrique de l’Ouest. Le groupe vend des camions, des tracteurs, des camions-bennes, des camions-citernes, ou encore des camions à ordures. Wang Chuanbo assure que le service après-vente et les pièces de rechange sont accessibles grâce à la coopération avec CRSG Automobiles. « Nos clients sénégalais qui se rendent au Mali ou en Guinée peuvent facilement avoir, s’ils en ont besoin, des pièces de rechange sur place », souligne-t-il.
En effet, le problème de la disponibilité des pièces de rechange est le souci le plus partagé par les propriétaires de véhicules de marques chinoises. « Ces pièces sont parfois rares à trouver sur le marché. Si on en trouve, il peut s’avérer qu’elles coûtent relativement cher », confie un propriétaire qui parle sous le couvert de l’anonymat. À l’en croire, il faut parfois passer commande, ce qui peut prendre beaucoup de temps. À ce propos, la société CCBM Automobiles dispose d’une chaîne de montage de véhicules des marques Great Wall et Chery et prévoyait de monter annuellement 4 500 véhicules. Une autre chaîne de montage concernant les véhicules Sinotruk avait été annoncée au Sénégal, mais elle n’a pas encore vu le jour. Les véhicules Sinotruk commercialisés au Sénégal sont montés au Maroc par la société chérifienne Riad Motors Holding.
Source : chinafrica.cn